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Bienvenue sur le site de l'Association Nationale de Retraités 
- Groupe Morbihan (56) 

de Noémi L - Pluvigner

L'Ecole du XVIII° au XXI° siècle,
dans une commune du Morbihan

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« Qui a eu cette idée folle

Un jour d'inventer l'école ?

C'est...c'est... »

C'est certes, celui qui n'avait point encore imaginé les années 2020 - 2021 !!!

Avec masque ? Sans masque ? Masque à partir de 6ans ? A partir de 11 ans ? Autant de questions auxquelles ministres, pédagogues, pédiatres, psychologues, journalistes, professeurs et spécialistes en tous genres tentent d'apporter leur éclairage, occupant  tous les plateaux de télévision, aggravant l'angoisse généralisée d'un monde au lendemain incertain. Certes, nous avons une pensée particulière et compatissante pour nos étudiants condamnés à passer leur journée devant un écran, privés de toute présence d'un professeur.

Ce début de XXI° siècle serait-il des plus funestes ? L'Histoire de l'Ecole dans notre région a connu des temps bien plus âpres et les élèves, des conditions de vie et d'apprentissage si difficiles qu'elles susciteraient des révolutions, aujourd'hui.

Revenir à l'école du Moyen-Age représenterait un travail fastidieux : à la chute de l'Empire Romain,  le christianisme jouera un rôle essentiel dans le système éducatif, qui sera confié aux monastères qui imposaient aux élèves une discipline de fer. On peut regretter la totale destruction de l'abbaye de Redon et de sa bibliothèque par les razzias des Vikings, qui nous a privés d'une riche documentation sur notre région. 
Si Charlemagne est tant cité, c'est qu'il "était préoccupé de relever le niveau intellectuel et moral de son peuple", et qu'il exigea un clergé plus instruit et un grand nombre de nouvelles écoles. Des capitulaires furent rédigés sur ce sujet, mais les réformes fluctuèrent aux cours des siècles.

Déjà, le concile de Trente qui se tînt de 1545 à 1563 rappelait aux évêques la nécessité d'ouvrir des écoles mais évidemment la naissance des écoles en milieu rural fut bien plus tardive qu'en villes. J'ai choisi la commune de Pluvigner comme exemple, sachant que cette localité du Pays d'Auray, est à l'image de nombre de communes rurales morbihannaises.

Certaines recherches historiques, particulièrement aux archives départementales, nous renseignent sur la situation économique et sanitaire dans cette Bretagne du XVIII° siècle où « deux grands déserts scolaires » apparaissent : le Pays Pourlet (Guéméné et ses environs) et les Landes de Lanvaux de Pluvigner à Plaudren. En effet moins de 20 % des hommes savent signer les actes de baptême, moins de 30% des conscrits savent lire et écrire (cf. Langlois). Ce problème de l'instruction constitue d'ailleurs un des points essentiels de l'évolution sociale du XIX°. De cette carence du savoir, découlera une méconnaissance totale de la médecine « en cette paroisse longtemps affligée d'un cours de maladie épidémique qui la désole » (maladie des voies respiratoires, pulmonaires, variole, rougeole, scarlatine, petite vérole) ; « elle (l'épidémie) a emporté un nombre considérable d'enfants du peuple dans les campagnes » (Goubert). Un document daté de 1774 signale 700 décès en 4 mois dans cette paroisse.

D'autre part, un autre rapport du procureur du Roi au Préfet du Morbihan, datant de 1818 nous apprend que pour l'instruction des garçons, « il n'y a pas un seul instituteur dans les cantons de Quiberon et Pluvigner » ; (or, ces 2 cantons représentent une dizaine de communes !!!)



Face à cette dramatique situation, le Comte de Lanvaux, Seigneur de Kéronic, conseiller honoraire au Parlement de Bretagne signe avec Monseigneur Bertin, évêque de Vannes, un traité afin que 3 sœurs, Filles de la Sagesse, viennent à Pluvigner pour l'instruction des filles, pour les opérations « de vaccine et occuper le petit hôpital ». C'est ainsi qu'en 1774, après grand'messe solennelle et procession, les sœurs furent installées dans cette maison dotée aux frais du comte de Lanvaux.
2 installation de 3 soeurs 1774 cadre

Un procès-verbal de 1719 précise que « le principal employ des Sœurs serait de s'appliquer à l'instruction et l'éducation des jeunes filles, à secourir et médicamenter les pauvres...sans rien prétendre exiger des dits paroissiens. »

Déjà, le traité de Claude Fleury datant de 1687, quant au choix et à la méthode des études des femmes, précise : « pratique de religion, lecture, écriture, rédaction usuelle, arithmétique pratique, rudiments de pharmacopée, jurisprudence en cas de veuvage », mais il est inopportun que les femmes soient « trop savantes » ... travaux d'aiguilles et tâches ménagères doivent prédominer ! 

Ainsi, une quarantaine de filles jouirent alors d'une instruction, tandis que la première école des garçons ne s'ouvrira qu'au siècle suivant.

Qu'était l'instruction dans nos paroisses avant cette date de 1774 ?
Les archives sont particulièrement pauvres en détails. Nous apprenons cependant, qu'à Vannes, les Ursulines laissèrent un livre de comptes datant de 1646 et que ces religieuses installèrent 7 maisons de soins (ou hospices) et d'instruction des filles, dans le Morbihan. Quelques titres de leurs propriétés ont été retrouvés à Pontivy et un projet de réalisation à Guéméné qui demeurera inabouti.

 

1789 : La Révolution

En début de la révolution, la maison des Sœurs fut changée en caserne : la troupe s'y installa et la laissa ensuite dans un état de totale dégradation.

En 1793 « A cette époque d'exécrable mémoire, ces saintes filles qui ne cessèrent d'accomplir avec zèle le but de leur institution, furent chassées et emprisonnées à Auray, le mobilier et la pharmacie dilapidés... » peut-on lire dans des documents d'archives.

C'est l'époque de la Constitution Civile du Clergé qui nationalise des biens d'Eglise afin d'éteindre la dette publique dont le montant atteint 2 milliards 400 millions. En s'attribuant la fortune du clergé, l'état prendra à sa charge « le soulagement des pauvres, des malades et les frais de culte » ... Nous assistons donc à la création d'une église nationale, indépendante de Rome ! En Anjou et en Bretagne les prêtres ne l'acceptèrent pas, mais, insermentés, ils furent voués à la déportation, les églises, les monastères pillés, les ordres religieux supprimés, voire suppliciés, déportés. L'abbé  J-M Guilloux , curé de Brandivy nous renseigne remarquablement sur le sujet . (cf  "Etudes sur une Paroisse Bretonne", ouvrage publié en 1890).

Malgré le sang versé, malgré les atrocités commises, les décisions prises lors de la Convention tiennent une place primordiale pour l'enseignement : « après le pain, l'instruction est le premier besoin du peuple » aurait décrété Danton, décidant de l'obligation scolaire et de la gratuité du premier enseignement. Les écoles centrales deviennent lycées et l'enseignement supérieur lui doit beaucoup : Polytechnique, l'Ecole des Mines, le Conservatoire des Arts et Métiers, les facultés de droits et de médecine, le Collège de France... 

Après cette période de terreur, de la chute de Robespierre, du Directoire, Bonaparte prend en mains, la France : l'époque du Consulat  qui se caractérise par la centralisation politique et administrative, la paix religieuse et le réveil de l'économie. L'instruction sera centralisée, elle aussi : l'Université de France régira souverainement lycées et facultés. Curieusement, l'enseignement primaire est laissé de côté (l'objectif serait-il de ne pas propager l'instruction du peuple ???).

Au Consulat succéderont l'empire Napoléonien et la naissance d'une nouvelle aristocratie.  C'est alors, en 1804, que notre concitoyen Chouan, Cadoudal né à Auray, et une douzaine de ses hommes monteront à l'échafaud. Napoléon qui aura anéanti les royalistes, a déjà à cette époque -là, des vues plus européennes que françaises, son imagination supplante le réel – ce qui le conduira à sa chute.

La paix religieuse rétablie explique le retour des congrégations. C'est en 1823 que le Conseil Municipal de Pluvigner prend connaissance d'une lettre du sous-préfet « qui avise aux moyens de rétablir 3 filles de la sagesse dans l'ancien local ... et de pourvoir à leur entretien » . L'école dès 1822 avait été réparée par les soins de Monsieur de Saint Georges, héritier du Comte de Kéronic.

Et l'école des Garçons ? Aux archives départementales, on trouve une lettre du maire au préfet l'informant qu'enfin « une école de frères des écoles chrétiennes (La Mennais) entretenues par la charité des habitants »   accueillerait 80 élèves ; la population de la commune est de 4480 habitants.

En 1820, le Frère Jean Le Mouroux ouvre la première école de garçons. Les exigences du recteur d'Académie sont précisées : le nouvel instituteur devra présenter "les certificats obtenus de son curé et du principal du collège, du brevet de second degré ... un garçon pieux et assez instruit" écrira le curé au recteur d'académie.

Un incendie dans la localité, détruisit 300 maisons au toit de chaume, dont l'école en 1824 - ce qui obligea l'instituteur suivant à regrouper 80 élèves qu'il avait en charge, dans un grenier - inconfort total !!! A ces élèves viendront s'adjoindre les militaires du cantonnement, qui eux aussi doivent apprendre à lire et écrire. Or livres, bancs et tables manquent en cette miséreuse classe ! D'autre part, nombre d'élèves des hameaux  sont retenus à la ferme pour les travaux agraires dès les beaux jours.

En 1829, l'école devint communale. Les archives deviennent plus éloquentes.
D'autres textes assez nombreux feront état de dissidences quant aux frais engendrés par le fonctionnement de l'école dite communale, entre le conseil municipal et la fabrique, propriétaire des locaux (la Fabrique est un organisme associatif paroissial que le curé préside, et dont les paroissiens - donateurs les plus généreux sont membres ; cet organisme existait dans toutes les paroisses et avait à charge l'entretien des bâtiments religieux et écoles). L'école devenue communale, la fabrique estimait pouvoir obtenir une aide pécuniaire de la commune. De sérieuses tensions s'ensuivront. 
Une note positive cependant, celle d'un inspecteur d'académie qui constate la parfaite maitrise de la langue française par la majorité des élèves. (hélas tous n'étaient point scolarisés) 

 

 Une classe de fin XIX°. On reconnaît ici les frères de la Mennais , à l'origine des premières écoles de garçons dans notre région , condamnés à l'exil quelques années plus tard.
fin XIX une classe devant le presbytère au Guern
 1949 - Jour de communion et Fête-Dieu ( je crois ) religieuses de face cette fois !!
1949 jour de communion

 
C'est donc là, les années des écoles publiques-privées.

 On ne peut comprendre cette période qu'en se référant aux lois scolaires de l'époque : lois Guizot et Falloux développées dans le chapitre suivant.

A partir de 1862, les débats furent nombreux au sein du conseil municipal sur l'utilité et la nécessité de la création d'une école publique communale. Il faudra attendre l'année 1882 pour obtenir une maison d'école pour les garçons et 2 postes d'instituteurs

Pourquoi ces débats, ces tiraillements ?

Les lois de la République régissent depuis 1833 l'instruction et l'éducation des enfants et des jeunes et se doivent d'être respectées. Nombreux sont les maires de nos communes qui réprouvent de telles obligations, le coût des constructions et des salaires étant élevé.

7 asile 1929 cadre
Cependant, en 1876, un courrier du Comte de Saint Georges indique que la présence d'une sœur supplémentaire serait nécessaire pour l'ouverture d'un asile libre. Qu'appelle-t-on « asile » ? Il s'agit d'une garderie, d'un genre d'école maternelle accueillant de jeunes enfants à partir de 2 ans jusqu'à leur entrée à l'école primaire pour l'apprentissage de la lecture, l'écriture et l'arithmétique.

On apprend également que c'est la loi de 1865, sous Louis-Napoléon-Bonaparte, qui introduit l'enseignement de l'histoire et de la géographie dans l'enseignement secondaire.

Les Lois Scolaires du XIX° siècle et début du XX°

 

1833 - loi Guizot : sous Charles X, la charte de 1830 prévoit ce que la loi Guizot votée en 1833 précisera : L'instruction des garçons et donc une école dans chaque commune de + de 300 habitants. Cette école peut être confessionnelle ou non mais une notion de laïcité y est introduite, l'instruction religieuse dépendant de la volonté paternelle. Toute commune doit avoir son école primaire.

15 mars 1850 – Promulgation de la loi Falloux sous le second Empire

Elle complète la loi Guizot rendant l'école obligatoire pour les enfants des deux sexes dans toute commune de plus de 800 habitants et exige la scolarisation de 6 à 12 ans. Elle soutient la liberté d'enseignement.

28 mars 1882 – loi Jules Ferry

Elle établit une école publique, laïque et obligatoire de 7 à 13 ans. C'est la suppression de l'enseignement religieux, la difficile époque du débat parlementaire entre Voltairiens et Catholiques.

A partir du 25 Août 1899, c'est la laïcisation totale de l'école – les congréganistes doivent se dissimuler ou fuir.

1901-1904 -Loi Emile Combes

Anticlérical radical, il mène une lutte pour la défense républicaine et laïque. Il éradique les congrégations enseignantes et interdit les associations confessionnelles. 3 000 établissements sont immédiatement fermés. Les Chartreux, les Frères des Ecoles Chrétiennes, (frères de la Mennais), les Ursulines devront s'exiler... Les fonctionnaires, les militaires sont fichés. La découverte de 20 000 fiches établies, à la suite d'une enquête secrète, concernant leur vie spirituelle, entraînera l'Affaire dite des Casseroles, et obligera Emile Combes à démissionner.

Loi de 1905 :  séparation de l'Eglise et de l'Etat

Loi de 1910 : Un arrêté préfectoral informe de l'interdiction absolue faite aux religieuses de donner des soins,  de visiter les malades ou d'enseigner

Quelques religieuses se dissimuleront en troquant le vêtement religieux contre une tenue vestimentaire ordinaire, en abandonnant leur nom de religieuse pour reprendre leur identité d'état civil, et pourront ainsi continuer leur mission.

A partir de 1903, des prêtres-instituteurs sont autorisés à remplacer les congréganistes : l'un de ces frères avait 108 élèves à lui seul, est-il signalé dans les cahiers paroissiaux de Pluvigner. Tous les frères durent s'exiler.

 

vignette école 103

 

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C'est également l'époque où on interdit aux enfants de pratiquer leur langue maternelle, le Breton, même sur une cour de récréation : nombreux sont nos grands-parents ou parents qui gardent des souvenirs cuisants des punitions infligées pour l'oubli d'une telle interdiction. Or, le breton était la langue du catéchisme !!! A l'enfant de s 'adapter !

A maintes reprises, l'administration rappelle à la municipalité l'obligation de créer une école de filles qui soit communale mais le refus de la municipalité est répétitif.

Ce ne sera qu'en 1912, qu'enfin, l'école communale des filles sera érigée. 

Les normes concernant la construction sont notées : respect des normes de salubrité et d'hygiène concernant les ouvertures, la lumière et l'aération, et la création d'une commission scolaire constituée de 7 membres. Jusqu'à cette année 1912, toutes les filles continuèrent donc à fréquenter l'école des Sœurs, dans laquelle enseignaient désormais des institutrices laïques.

Nombreux seront encore les conflits et débats houleux aux Conseils Municipaux quand il s'agira de création d'écoles de hameaux ; or, dans une commune étendue sur un diamètre de + de 15 km, en cette fin de XIX° et début de XX° siècles, l'éloignement et les conditions de vie à la campagne poseront un énorme problème aux enfants pour se rendre à l' école du centre-bourg ou de la ville (ni car scolaire, ni voiture familiale, pour déposer l'enfant au seuil de sa classe !).

Deux hameaux d'importance seront cependant dotés d'écoles publiques, à savoir Malachappe et Bieuzy-Lanvaux.

Effectivement, c'était chaussés de sabots de bois que nombre d'enfants parcourront des sentiers boueux, humides en hiver sur 4-5-6 km pour rejoindre l'établissement scolaire. La blouse que tous portaient n'était fréquemment qu'un cache-misère. Les engelures aux pieds, aux mains étaient douloureuses et fort gênantes pour la bonne tenue du porte -plume. La musette contenait le casse-croûte et la bouteille de cidre pour le déjeuner ! Il est vrai que l'eau du puits n'était pas toujours potable et souvent à l'origine d'infections, de maladies dues aux bactéries. Les cantines communales n'existaient pas, alors certains de ces élèves étaient accueillis dans des bistrots où une soupe chaude - un bouillon dans lequel trempaient des tranches de pain - les réchauffait en hiver.

« Comment peut-on dire que c'était le bon temps ? » s'exclame une Pluvignoise presque centenaire ! « La lampe à pétrole pour seul éclairage, dans une pièce commune où nous devions faire nos devoirs. Les doigts pleins d'encre, les taches sur le cahier... les punitions, les humiliations, le chapeau d'âne, les coups de baguette...  De plus nous devions participer aux travaux de la ferme, garder les vaches, les traire, marcher par tous les temps ! Non ce n'était pas le bon temps ! »

Le sectarisme ne date point d'aujourd'hui ! Nul ne parlait de paix scolaire en ces années-là : élèves de « l'école du diable » et ceux de « l'école des curés » se livraient des guerres sans merci, les noms d'oiseaux fusaient, des rixes allant jusqu'à faire tomber l'adversaire dans l'étang du bourg. Souvenirs inoubliables des personnes les plus âgées qui retrouvent le sourire, à l'évocation de ce passé ! 

« J'étais à l'école des Sœurs mais j'ai quand même épousé un gars de l'école rouge » conclura notre interlocutrice, souriant d'un air coquin.

La Loi du 9 Août 1936 rend la scolarité obligatoire jusqu'à l'âge de 14 ans, l'âge du passage du certificat d'études ; l'obtention de cet examen permettait alors l'accès à certains postes de l'administration. Il revêtait donc un caractère fort important.

 

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1939-1945 : les années de la seconde guerre mondiale

 

En juillet 1939, l'école Sainte-Anne inaugurait de nouvelles constructions et organisait une manifestation festive pour l'événement. La fête fut de courte durée : c'est l'armée qui étrenna ces nouveaux bâtiments, l'armée française puis l'armée allemande qui occupa la presque totalité des classes ; Cette même année vit arriver à Pluvigner comme dans de nombreuses communes Morbihannaises situées en retrait par rapport à la côte, plusieurs vagues de réfugiés.

 La première débarqua à la gare : c'étaient les filles d'un pensionnat de Ploemeur, qu'accueillirent les Sœurs de la Sagesse Elles purent passer le brevet élémentaire et le brevet supérieur dans la commune. Les Allemands avaient envahi la rade de Lorient. Elles durent donc s'expatrier !

   Cette même année, aux Ploemeuroises vint s'adjoindre les « Nordistes » de la Somme et de l'Aisne, fuyant les combats : un surcroît de population de 1500 réfugiés qui inspira compassion et occupa l'ancienne école et la salle de patronage.

   A la même époque, un détachement allemand s'incrusta au presbytère et s'empara de toutes les chambres, tandis qu'un second détachement de jeunes soldats allemands également, mit les religieuses en demeure d'évacuer leurs dortoirs, leur accordant une 1/2 heure pour quitter les lieux !!! Les pensionnaires durent, ce soir- là, "dormir dans les corridors !", racontent les archives paroissiales

  La seconde vague de réfugiés, en 1943, quittait le Port-Louis, Riantec, Plouhinec, Locmiquélic et autres bourgades du bord de mer à la recherche de lieux plus sécurisés ; le train facilitait les déplacements ; l'accueil était sommaire dans des maisons et des fermes sans grand confort.

Les écoles durent s'adapter au manque total d'espace !  D'autres lieux pour étudier furent donc trouvés : la chapelle des Orties fut réquisitionnée et grâce à une légère cloison de planches, 2 classes y trouvèrent refuge : 105 élèves occupèrent ce lieu de culte. Dur fut l'hiver 43 ! pas de poêle dans une chapelle, l'encre gelait dans les encriers !

  La troisième vague correspond à l'évacuation de Lorient en 1944.

Les effectifs enflant démesurément dans les écoles, on réquisitionna une salle de bal au Hirello et des salles de restaurants, de cafés et le cinéma. Les heures d'enseignement durent être réparties par ½ journées, les élèves du matin laissant leurs places à ceux de l'après-midi. Les tables, les sièges manquaient, alors on rapprochait les pupitres essayant de gagner quelques places, se tassant, oubliant de se montrer exigeants, en ces temps difficiles.

  C'est alors que le curé de Bieuzy- Lanvaux, face à pareille situation, décida de créer une école pour tous les élèves répartis et instruits dans les greniers des maisons ou les hangars, dans sa paroisse.

  Deux cultures, celle de l'Armor et celle de l'Argota se côtoyaient, partageant le même dénuement, la même pauvreté, mais grâce à la vie scolaire, l'amitié et la complicité naissaient spontanément. On raconte même qu'une forme de marché noir s'organisait sur les espaces de récréation : poissons et coquillages contre sacs de pommes, de pommes-de-terre, ou autres légumes voire morceaux de lard, beurre...

 

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       Madame Cario, que j'ai rencontrée à Vannes, âgée de 96 ou 97 ans l'an passé, se souvient parfaitement de cette époque : « j'étais une de ces filles réfugiées, de Ploemeur et après le brevet supérieur, on m'a demandé de rester comme institutrice car les instituteurs rappelés sous les drapeaux manquaient et le recrutement devenait de plus en plus difficile. »

 Particulièrement sportive, elle sera à l'origine d'une équipe de gymnastique féminine qui se distinguera aux compétitions départementales.  Elle me parlera également du chant choral, du groupe des chanteuses de rue, auquel elle adhéra et de l'équipe de théâtre née en 1942… Etonnamment, de la rigueur de ces années-là, seuls les bons souvenirs lui restaient en mémoire.

 « Une époque tellement perturbée, ajouta-t-elle, mais l'ambiance était si conviviale ! J'étais heureuse ». Dans sa voix résonnait la fierté d'avoir su être pionnière et d'avoir gaillardement traversé ces sinistres années. (Cette charmante dame est décédée en fin 2020. Un livre s'est fermé)

C'est en 1940, sous Pétain, que les écoles privées retrouvèrent la totale liberté d'enseigner, mais devant assurer la rémunération des salaires des enseignants et toutes les charges concernant les bâtiments, elles furent dans une situation financière fort difficile, voire frôlant la faillite.

La loi Debré du 31 Décembre 1959 dont le but, dans le respect de la liberté de l'enseignement, est de permettre aux établissements privés ouverts de fonctionner correctement, a conduit à la mise en place de contrats entre les écoles et l'état : contrat simple ou contrat d'association.

C'est au cours de ces années d'après-guerre et jusqu'à ce jour, que les écoles publiques connaîtront une florissante expansion en Bretagne. L'obligation de la scolarité jusqu'à 16 ans a provoqué l'ouverture de collèges dans tous les chefs-lieux de cantons, depuis l'ordonnance du 6 Janvier 1959.

L'accès au lycée, voire aux études supérieures s'est vraiment démocratisé. Les lycées techniques en pleine expansion, les lycées agricoles, les lycées professionnels et la multiplicité des filières de lycées classiques offrent à chacun un panel considérable de choix et tente de répondre aux capacités et attentes du plus grand nombre.  Les transports scolaires ont magnifiquement rendu l'accès aisé, de tous, à tout établissement. Les moyens de communication sont pléthore ! Qui n'a pas son Iphone ou son IPad ? Le nombre de voitures que les étudiants possèdent impressionne.

 

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La promulgation de la loi sur une école de la confiance, du 28 Juillet 2019, rendant l'obligation de l'accueil en milieu scolaire, de 3 à 18 ans voit-elle ici son accomplissement ? Difficile de répondre en cette année 2020 qui désarçonne tout analyste.

Texte rédigé à partir des sources suivantes :

- Archives départementales du Morbihan  et  archives paroissiales de Pluvigner
- Archives départementales de Vendée (Soeurs de la Sagesse) et des Frères de la Mennais (Ploermel)
- et récits de personnes ayant vécu des évènements mémoriels.

 Précision : les photos encadrées peuvent être agrandies (clic sur l'image)